Pierre Lecomte de Noüy
L'Homme devant la science
Flammarion, Science de la Nature, 1969
Les sciences ont deux extrémités qui se touchent: la première est la pure ignorance naturelle où se trouvent tous les hommes en naissant. L'autre extrémité est celle où arrivent les grandes âmes qui, ayant parcouru tout ce que les hommes peuvent savoir, trouvent qu'ils ne savent rien, et se rencontrent dans cette même ignorance d'où ils étaient partis. Mais c'est une ignorance savante qui se connaît. Ceux d'entr'eux qui sont sortis de l'ignorance naturelle, et n'ont pu arriver à l'autre, ont quelque teinture de cette science suffisante et font les entendus. Ceux-là troublent le monde et jugent plus mal de tout que les autres.
[II. L'analyse l'interpolation et l'extrapolation]
Je commence à craindre qu'il n'y ait dans l'esprit français quelque chose d'empirique, et que le seul moyen de lui faire admettre une vérité ne soit de la lui présenter comme un objet d'expérience.
Jules Lechelier
Lettre à Paul Janet, 15 mai 1885
[V. Les critiques]
Ce qui est complexe n'est pas toujours profond; mais ce qui est profond n'est pas forcément simple.
[VII. Les responsabilités]
On n'apprend pas aux hommes à être honnêtes gens, et on leur apprend tout le reste; et cependant, ils ne se piquent de rien tant que de cela. Ainsi ils ne se piquent de savoir que la seule chose qu'ils n'apprenent point.
[VIII. Résumé et conclusions]
La Science des choses extérieures ne nous consolera pas de l'ignorance de la morale au temps de l'affliction. Mais la science des murs nous consolera toujours des choses extérieures.