Il n'y a rien de plus fructueux ni de plus amusant que d'être distrait d'une chose par une autre chose.

[L'infiniment singulier]
...ce dont il faut déduire que « l'on ne parle pas tout seul (les autres même absents étant impliqués dans l'acte de parler puisque c'est leurs mots qu'on emploie) et que dès l'instant que l'on parle - ou écrit, ce qui revient au même - on admet qu'en dehors de soi il existe un autrui, de sorte qu'il serait absurde de récuser, si l'on parle ou écrit, les noeuds qui vous attachent au cercle indéfini d'humanité que par-delà les temps et les lieux votre interlocuteur sans visage représente.

[Les Tueurs de temps]
Boswell : Nous devenons las dans l'oisiveté.
Johnson : c'est, monsieur, parce que les autres, étant occupés, nous voulons de la compagnie; mais si nous étions tous oisifs il n'y aurait pas de lassitude; nous nous distrairions tous les uns les autres.

[Un héros solipsiste]
La sincérité, c'est bon à l'égard de soi-même. À l'égard des autres c'est sans intérêt, et le plus souvent maladroit. Ce qu'on appelle les bons sentiments ne sont que des ridicules. On en a toujours assez, sans avoir encore ceux-là. Ce qui importe avant tout c'est soi, tel qu'on est. Du moment qu'on l'est avec réflexion, sens critique, tout est sauvé. Je le disais hier soir à Gourmont et Vallette, au Mercure. Il faut avoir le goût de ses idées, même fausses ou déplaisantes.

[Cosmologie ludique]
Cependant il frappe la balle avec un grand mouvement tranquille, comme quelqu'un qui du fond de son sommeil refermerait la main sur de l'air, en tentant d'attraper les fruits dont il rêve.

[Le futur champion]
Que seraient les déserts de la vie sans les mirages éclatants de nos pensées?

[Élucubrations vélomotorisées où il est question du temps [...]]
J'ai pensé et écrit tellement sur le temps... Mais je vais vous raconter une anecdote : un philosophe argention et moi, nous conversions au sujet du temps et le philosophe dit : « dans ce domaine, on a fait de gros progrès ces dernières années. » Et moi j'ai pensé que si je lui avais posé une question à propos de l'espace, sûr qu'il me répondait : « dans ce domaine, on a fait de gros progrès ces derniers cent mètres. »