Collectif d'auteurs
Dictionnaire des citations françaises et étrangères
Larousse, 1980
Car je fais dire aux autres ce que je ne puis si bien dire, tantôt par faiblesse de mon langage, tantôt par faiblesse de mon sens.
Montaigne
Essais (II, 10)
Je n'ai jamais méprisé ces hommes de l'autre génération, qui parlaient par citations; cela valait toujours mieux que ce qu'ils auraient dit à leur manière.
[...] Le beau nous somme de penser. Devant un beau vers ou devant une belle maxime, l'esprit est tenu de rendre compte de cet immense pouvoir; et, puisque le commentaire n'égale jamais le trait, c'est la preuve qu'il faut revenir et rassembler ses pensées, comme des troupes, autour du signe.
Alain
Propos de littérature (n° XXXV) [Flammarion]
Dès qu'une vérité dépasse cinq lignes, c'est du roman.
Jules Renard
Journal (3 sept. 1902) [Gallimard]
Il n'appartient qu'à ceux qui n'ont jamais été cités de ne citer personne.
Gabriel Naudé
Avis pour dresser une bibliothèque
Le moyen infaillible de rajeunir une citation est de la faire exacte.
Émile Faguet
cité lui-même par André Chaumoix (discours de réception à l'Académie française, 1931)
Un dictionnaire commencerait à partir du moment où il ne donnerait plus le sens mais les besognes des mots.
Georges Bataille
Documents (Mercure de France)
Votre fils ne sait rien? Que vous êtes heureux, il ne citera pas!
Ninon de Lenclos
rapporté par Stendhal dans son Journal
Ne fais donc jamais de citations classique: tu exhumes ta grand-mère en présence de ta maîtresse.
Léon-Paul Fargue
Sous la lampe (Gallimard)
On est vraiment confus de penser au temps que les hommes perdent à feuilleter des dictionnaires, quand on a eu le bonheur de causer quelque temps avec un chien danois bien élevé, comme le bailli de l'île de Man.
Charles Nodier
La Fée aux miettes
La plupart des faiseurs de recueils de vers et de bons mots ressemblent à ceux qui mangent des cerises ou des huîtres, choisissant d'abord les meilleures et finissant par tout manger.
Chamfort
Maximes et pensées
Pas trop de citations d'anglais, d'italien, d'espagnol. Tu as l'air d'un larbin d'hôtel qui colle des étiquettes sur des bagages.
Léon-Paul Fargue
Suite familière (Gallimard)
Pourquoi donc [...] citez-vous un certain Aristote en grec? - C'est, répliqua le savant, qu'il faut bien citer ce qu'on ne comprend point du tout dans la langue qu'on entend le moins.
Et pourtant ils existent 1954-2004 : Le monde libertaire a 50 ans
Le Cherche Midi, 2004
[p.13]
Il faut créer un monde où la naissance donne droit à la vie.
[p. 31]
Vivre en marge pour ne pas mourir au milieu.
[p. 39]
La guerre serait un bienfait si elle ne tuait que les professionnels.
[p. 91]
Étrangers, ne nous laissez pas seuls avec les Français !
[p. 99]
Si les élections pouvaient changer la vie, elles seraient interdites.
[p. 117]
Socialiste révolutionnaire ?
C'était jadis un pléonasme, c'est maintenant un paradoxe.
[p.135]
En politique il n'y a pas de crime parce qu'il n'y a pas de loi.
[p. 163]
En matière de révolte, nul n'a besoin d'ancêtres.
[p. 207]
L'économie est blessée, qu'elle crève.
[p. 233]
Les religions qui se font en troupeau se terminent à l'abattoir.
[p. 257]
Les prolétaires sont ceux qui savent comment faire les choses, les patrons pourquoi les faire.
[p. 297]
Chasteté : vice contre nature.
[p. 317]
Les femmes qui veulent être les égales de l'homme manquent d'ambition.
[p. 335]
Le terrorisme, c'est l'amour fou.
[p. 343]
Ne dites pas : M. le prof. Dites : crève salope !
Affiche, comité de salut public des vandalistes, Bordeaux
[p. 355]
La nature des choses fait qu'on ne peut attendre d'un arbuste transformé en bâton qu'il ait des feuilles.
[p. 371]
Ne me libère pas, je m'en charge.
Dix contes et nouvelles fantastiques par dix auteurs québécois
Quinze
Vous qui entrez, laissez toute espérance.
Les philosophes 1 (De Platon à Montesquieu)
Livre de Poche / biblio essais n°4235
[De la lecture des philosophes]
Phusei enesti tis philosophia tè toû andros dianoia.
(Par nature il y a dans l'entendement de l'homme une philosophie.)
[Platon ou L'art suprême du dialogue]
C'est l'ignorance de la philosophie qui rend difficiele l'appréhension de la philosophie platonicienne.
[Aristote ou Le langage de l'être]
La vie humaine consiste principalement dans l'acte de sentir ou de penser.
Éthique à Nicomaque, 1770a 18-19
[Épicure ou La Physique du Sage]
Épicure peut être appelé le plus célèbre philosophe de la sensibilité.
[Lucrèce ou Les pactes du hasard]
Natura libera... dominis privata superbis, Ipsa sua per se sponte omnia dis agere expers.
(La Nature libre... affranchie de maîtres superbes, gouvernant elle-même son empire sans contrainte et sans l'aide des dieux.)
De natura rerum, II, v. 1090-92
[Épictète ou Le pouvoir du maître]
Pour moi, j'ai tout examiné et personne n'a de pouvoir sur moi.
Épictète
Entretiens, IV, VI.
[Marc Aurèle ou L'empire sur soi-même]
Ni tragédien, ni courtisane !
Marc Aurèle
Pensées, V. 28
[Sains Augustin ou L'appel de la béatitude]
Et ce n'est pas par ses propres lumières, mais par participation à la Lumière, que l'esprit acquerra la sagesse... Car il n'est possible de parler de sagesse pour l'homme que dans la mesure où cette sagesse appartient aussi à Dieu.
Saint Augustin
De Trinitate, XIV.
[Saint Thomas ou L'humanisme intégral]
Dieu seul peut rassasier la volonté de l'homme.
Somme théologique, la IIae q.2 a.8.
[Machiavel ou La fondation de l'État]
Il ne serait pas un ennemi de l'autruche, celui qui lui crierait ouvre tes yeux, regarde, voilà le chasseur, enfuis-toi de ce côté pour lui échapper.
J.G. Fichte
Sur Machiavel écrivain
[Montaigne ou Le goût de la vérité]
JE festoie et caresse la vérité en quelque main que je la trouve.
Montaigne
Essais, III, 8.
[Montaigne ou Le goût de la vérité]
J'aime ces mots, qui amolissent et modèrent la témérité de nos propositions : À l'aventure, Aucunement, Quelque, On dit, Je pense, et semblables.
Montaigne
Essais, III, 11.
[Hobbes ou L'État représentatif]
Si l'État est fort, il nous écrase ; s'il est faible, nous périssons.
[Descartes ou La dictée de la raison]
Nous avons tant de fois éprouvé dès notre enfance, qu'en pleurant, ou commandant, etc., nous nous sommes fait obéir par nos nourrices, et avons obtenu les choses que nous désirions, que nous nous sommes insensiblement persuadés que le monde n'était fait que pour nous, et que toutes choses nous étaient dues...
Mais il n'y a point, ce me semble, de plus digne occupation pour un philosophe, que de s'accoutumer à croire ce que lui dicte la vraie raison, et à se garder des fausses opinions que ses appétits naturels lui persuadent.
Descartes
Lettre à ***, mars 1638
[Descartes ou La dictée de la raison]
Il n'y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir, que nos pensées.
Descartes
Discours de la méthode, III
[Pascal ou L'ordre impossible de l'homme]
Je le voyais peu à peu croître de telle sorte que je ne le connaissais plus, particulièrement en humilité, en soumission, en défiance, en mépris de soi-même et en désir d'être anéanti dans l'esprit et la mémoire des hommes.
Lettre de Soeur Sainte-Euphémie à Mme Périer au sujet de son frère Blaise Pascal, 25 janvier 1655
[Spinoze ou La nécessité comprise]
Je ne prétends pas avoir trouvé la philosophie la meilleure, mais je sais que j'ai connaissance de la vraie.
Spinoza
Lettre à Albert Burgh, 1675
[Malebranche ou Les raisons de l'ordre]
Malebranche... l'un des plus profonds méditatifs qui aient jamais écrit.
Voltaire
Le Siècle de Louis XIV
[Leibniz ou Les principes de la raison]
Je juge que dans l'univers il n'y a rien qui soit plus vrai que le bonheur, ni plus heureux et plus doux que la vérité.
Leibniz
De l'origine radicale des choses, 15.
[Montesquieu ou La hantise du despotisme]
J'ai pu vivre dans la servitude, mais j'ai toujours été libre j'ai réformé tes lois sur celles de la Nature, et mon esprit s'est toujours tenu dans l'indépendance.
Montesquieu
Lettres persannes (lettre 161, Roxane à Usbek).
[Montesquieu ou La hantise du despotisme]
Pour qu'un homme soit au-dessus de l'humanité, il en coûte trop cher à tous les autres.
Montesquieu
Dialogue de Sylla et d'Eucrate
Mathématiques venues d'ailleurs
trad. Jean-Michel Kantor
Belin,1982
Arrière au symbolisme!
Vive la rose vivante!
Mot d'ordre du mouvement littéraire acméiste, Moscou, 1920.
la connaissance d'un seul fait, acquise par la découverte de ses causes, prépare l'esprit à comprendre et établir d'autres faits sans avoir besoin d'autres expériences.
[15. L'art de la récurrence]
S'il y a marqué « éléphant » sur la cage d'un lion, ne croyez que vos oreilles.
Les philosophes 2 (De Hume à Sartre)
Livre de Poche biblio/essais n°4236
[Rousseau ou Les principes du droit politique]
L'irréel est produit hors du monde par une conscience qui reste dans le monde et c'est parce qu'il est transcendantalement libre que l'homme imagine.
Sartre
L'Imaginaire, «Idées», p.358
[Kant ou La liberté comme clef de voûte]
Lorsque tu vas à l'aventure, laisse quelque trace de ton passage, qui te guidera au retour... Mais si tu arrives à un endroit infranchissable ou dangereux, pense que la trace que tu as laissée pourrait égarer ceux qui viendraient à la suivre. Retourne donc sur tes pas et efface la trace de ton passage. Cela s'adresse à quiconque veut laisser en ce monde des traces de son passage. Et même sans le vouloir, on laisse toujours des traces. Réponds de tes traces devant tes semblables.
René Daumal
Le Mont Analogue
[Hegel ou L'universelle vie de l'esprit]
L'enfant, esprit enveloppé en soi...
[Hegel ou L'universelle vie de l'esprit]
L'enfant n'a aucune rationalité, mais il a la possibilité de devenir rationnel... Dans les plus simples mouvements de l'enfant, il y a déjà l'humanité. Ses premiers gestes, ses premièrs cris sont déjà loin de l'animalité.
Hegel
La Raison dans l'histoire
[Hegel ou L'universelle vie de l'esprit]
La fréquentation de Hegel me fait beaucoup de bien: j'aime ces hommes de tête, calmes et pondérés, parce qu'auprès d'eux on peut si bien faire le point, quand on ne sait pas très bien où l'on en est avec soi-même et avec le monde.
[Comte ou L'institution de l'Humanité]
Qu'est-ce qu'une grande vie?
Une pensée de la jeunesse, exécutée par l'âge mur.
[Cournot ou l'ordre du hasard]
L'idée de l'ordre ne peut nous être donnée que par l'ordre lui-même.
Cournot
Essai sur le fondement de nos connaissances, p. 130
[Kierkegaard ou Le cri paradoxal de l'intériorité]
Un crieur public de l'intériorité est un curieux animal.
Kierkegaard
Post-scriptum, p. 50
[Karl Marx ou La philosophie et la politique]
Le monde, les philosophes n'ont fait que l'interpréter de diverses façons: il s'agit de le transformer.
Marx
XIe Thèse sur Feuerbach
[Nietzsche ou La philosophie à coups de marteau]
Nous faisons une expérience sur la vérité! Peut-être l'humanité en périra-t-elle! Eh bien soit!
[Husserl ou La transparence du monde]
J'essaie de guider, non pas d'enseigner une doctrine, mais seulement de montrer, de décrire ce que je vois.
[Husserl ou La transparence du monde]
Gardons par conséquent le regard fixé sur le plan de la conscience, et étudions ce qui se trouve contenu dans ce plan à titre immanent.
Husserl
Idées directrices, I, 33.
[Bregson ou La mémoire de la vie]
Cet Un est totalité sympathique, est comme un être vivant: le plus éloigné y est proche (...). Car, dans un être vivant, qui tend à l'unité, rien n'est à ce point éloigné qu'il ne soit proche, de par la tendance naturelle de l'unité vivante à la sympathie.
Plotin
Ennéades, IV, 4, 32
[Alain (Émile Chartier) ou La critique de la raison impure]
La philosophie est certes une grande chose: on peut en faire tout ce qu'on veut, excepté quelque chose de plat. Il en est de même pour la Raison, pour la Sagesse, lesquelles consistent surtout dans un feu dont il importe de conserver l'efficacité: car rien ne se perd plus aisément que la vie et la force des idées.
Alain
1er décembre 1946, préface au Spinoza
[Bachelard ou La vigilance de la veille]
Le dodécaèdre est cueilli comme le fruit géométrique d'un rêve rationnel. La pomme d'une molle rondeur se géométrise dans la main vigoureuse et gourmande. Les objets sont ici placés philosophiquement entre nature et mesure, entre rêverie et création.
Gaston Bachelard
Préface au Traité du burin d'Albert Flocon, 1953, rééd. Ed. Clancier/Guénaud, 1981
[Bachelard ou La vigilance de la veille]
Il faut aller du côté où l'on pense le plus.
Bachelard
Le Surrationalisme
[Merleau-Ponty ou L'enracinement du sens]
Ce que j'essaie de vous traduire est plus mystérieux, s'enchevêtre aux racines mêmes de l'être, à la source impalpable des sensations.
[Heidegger ou La question de l'être]
Car vous êtes visiblement depuis longtemps au fait, quant à vous, de ce que vous pouvez bien vouloir dire à chaque fois que vous dites le mot «étant» («on»); mais nous, au début nous pensions le savoir: et maintenant, nous ne savons plus que penser...
Platon
Le Sophiste, 244 a.
[Sarte ou Le tourbillon de la liberté]
Il n'est pas permis à personne de dire ces simples mot: je suis moi. Les meilleurs, les plus libres peuvent dire: j'existe. C'est déjà trop. Pour les autres, je propose qu'ils usent de formules telles que «Je suis Soi-même» ou «Je suis un Tel en personne».
Jean-Paul Sartre
Saint Genet comédien et martyr, p. 100.
«Dansons autour du chaudron», les sorcières dans la littérature
Gallimard, Folio 2€ #4274
Tu fus mienne dès la naissance
Ce sont des démons déguisés en femmes
Saisi par les griffes desséchées de la sorcière
Qui est vivant ?
Editions verticales, 2007.
«Dans le poème de Trakl Entlang (“Tout le long”), on trouve ce vers : “Dis-moi depuis quand nous sommes morts” ; dans Goldene Sonette ("Sonnets d'or") de Daübler : "Combien il est vrai que nous sommes morts il y a longtemps".
L'unité de l'expressionnisme consiste à exprimer ce fait que des hommes devenus totalement étrangers les uns aux autres et en qui la vie s'est retirée, sont, du même coup, morts.»
Theodor W. Adorno
Minima moralia (1951).